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Rumeurs du Nord, Espérance.

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Rumeurs du Nord, Espérance. Empty Rumeurs du Nord, Espérance.

Message par Shalna Seledor Sam 9 Mai - 0:34

Cela fait déjà deux mois, ou plus, que Shalna Seledor est partie dans le Nord, accomplir son rôle de Chevalier Dragon. L'escouade Espérance, dont elle est aujourd’hui Chef officiel, est composée de jeunes gens, peu expérimentés. Pratiquement tout les officiers sont des anciens Chevaliers d'Althyk et elle a eu la chance de recevoir leurs confiances ainsi que leurs loyautés. Maintenant qu'ils font partis intégrante de l'armée Ishgardaise, nombres recrues, soldats et vétérans, dont moi, ont rejoints l'escouade, beaucoup à être plus expérimentés que la jeune chef, et de loin ... Jeune mais entreprenante, la parole sûre et têtue.

     Espérance est passée par beaucoup de moments critiques, difficiles et ça va continuer. La guerre est rude, les Dravaniens sont violents et imposants, combien des anciens Chevaliers s'attendaient vraiment à ça ? Probablement aucun. La vision de la mort et du sang est devenue presque quotidienne et les larmes qui coulent ne se comptent plus. Il faut une sacré expérience de guerre pour se tenir digne, une sacré force de volonté pour cacher sa peine face aux autres ... Mais se prouver qu'on est humain en se laissant aller en cachette, un exercice fréquent pour la petite.
     Quand l'on se bat contre des créatures aussi imposantes, on se rend compte assez vite qu'un simple coup d'épée ou de dague que l'on enfonce dans un corps humanoïde c'est très supportable ... Toujours difficile, mais supportable. C'est quand un soldat, ou un ami se fait arracher la jambe comme s'il n'était qu'une simple brandille de bois ou bien que son corps explose à cause des cris surpuissants de certains Eibis, que l'on place sa main devant sa bouche, assourdi par le choc, tremblant au milieu de la neige, avec finalement aucun temps de répit, il faut gagner ou s'en sortir au moins, on vit ou l'on meurt, laissant tout tomber.
     Eh bien, ils tiennent le coup, autant ces anciens Chevaliers que les jeunes recrues, je suis plutôt impressionnés. On aime bien se plaindre des nouvelles générations, se dire qu'avant s'était plus dur ... Mais non, à leurs âges, ma vie était bien plus tranquille et à vrai dire, moi j'étais encore en train d'apprendre à me battre. La petite, enfin, Dame Seledor ... N'allez pas penser que je ne la respecte pas, bien au contraire, mais je trouve ça terrible qu'elle soit là. Bien sûr c'est elle qui l'a choisie, mais bon ... Soyons clairs tout de même, c'est une gamine hein ? C'est d'ailleurs là que je la respecte même si c'est presque insensé de l'avoir pour chef. Je suis perplexe et pour l'instant encore en vie, soit.
     Les officiers sont intéressants aussi. La sous-chef, Aranael vient d'une bonne famille, très bien élevée, pas assez militairement à mon sens. Elle voue une telle volonté à défendre sa Chef que ça en devient presque étrange. Si elle le pouvait elle serait probablement collée à elle en permanence.*amusé*
Le scribe/diplomate, Ji Liuh, a l'air plus vieux bien que tout frêle. On le voit rarement mais il fait son travail, je le trouve instable personnellement, sa manière de vouloir caché toute sorte de sentiment ... On dirait que ça va exploser à tout moment.
Tali, la spécialiste en éther est très discrète, elle fait son travail et écoute Dame Seledor sans faire d'histoire. Je dirais que pour le moment c'est la plus stable mais pas la plus impliquée dans le conflit.
Et la médecin-chef, Ishaya ... Un incroyable médecin mais je sais pas où elle a appris son métier, mais il faudrait peut être leur dire que le tact ça compte quand même ! En dehors de ça, elle est marrante et apporte un peu de couleurs là où tout est blanc, fade.
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     J'ai appris que Ray, le jeune adolescent qui devait accompagné Seledor en mission avait perdu la vue. J'étais présent quand la petite Chef avait négocié pendant quoi ... une heure, une heure et demie pour ne pas l'emmener et je pense qu'elle avait raison. ''Mission d'exploration pour mettre les jeunes dans le bain le plus vite possible''. Elle n'a pas eu le choix d'accepter ou d'être jugée inapte à maintenir son rôle. Le plus drôle avec Ishgard ... Je vais dire Ishgard parce que je sais pas à qui m'en prendre vraiment, c'est que ... refusé d'emmener un adolescent en mission de guerre réelle c'est plus grave que de revenir avec ce même adolescent ayant perdu la vue. J'étais pas là quand elle en a informé les concernés mais c'est assez stupide. Ca me casse le moral de voir la vie de tout ces jeunes gâchées mais j'en suis plus à ça près.
     Vient ensuite l'attaque massive visant à percer les défenses ultimes d'Ishgard. La tour Espérance a été prise d'assaut par une horde de draguêpe, c'est de la saloperie super rapide, elles sont fragiles et pas bien fortes mais elles arrivent à condenser l'éther pour en faire des bourrasques de vent qui pourraient arracher le bras d'un Roegadyn. *soupire* Ouais ... On a perdu pas mal de gens. La chef n'était pas là mais sa stratégie défensive a payé. Bon d'accord on sait pas si ça aurait pu être mieux, mais en même temps j'avais pas de meilleures idées et les autres non plus, à la tour. Cette dernière a tenue, point et pour Ishgard c'est satisfaisant. Par contre ...
Depuis là, Dame Seledor est de moins en moins présente, la dernière fois que je l'ai vue elle était même pas maquillée ... C'est con mais c'est bien la première fois, puis étonnement, la fatigue se voit 2 fois voir 3 fois plus qu'avant. Ses cheveux deviennent gris ... J'ai pas osé lui dire mais je me demande si c'est le stress.
Je sais pas trop ce qu'il se passe au lieu de rapatriement au camp du dragon.

     Pis il y a cette fois, quand on l'a vu traversé la tour de haut en bas sans rien dire à part ''Je suis Shalna Seledor'' avec un manteau violet bizarre, pas son genre. J'y connais rien en magie ou quoi, mais Dame Seledor, la sous-chef et la médecin-chef en ont conclu que c'était pas elle en fait, à ce moment et que c'est soit un coup des hérétiques, soit du monde d'Hylla, j'ai pas compris mais de toute façon la prochaine fois qu'on la revoit bizarre comme ça on l'arrête.

Bon, j'en ai assez dis, allez, j'y retourne. *finit sa fiole d'alcool fort et se lève brusquement, sa cotte de maille cliquetante.*



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Message par Aranael Jeu 28 Mai - 20:55

Infirmerie du camp de la tête du dragon, mercredi. (ce texte fait suite à la mission "Inquisition Noilaux")

- Je suis désolée, Shalna. Pardonne-moi.

*C'était un rituel qu'elle avait établi ces 4 derniers jours: Dormir à peine trois ou quatre heures, installée sur son matelas de fortune que monsieur Ishmael avait eu la bonté de lui fournir, sa hache posée à proximité de sa main et prête à servir. Ouvrir les yeux. Manger un bout de pain durant quelques minutes qu'elle s'accordait égoïstement, avant de se tourner vers le petit corps frêle de sa supérieure. Prendre une respiration pour tenter de débloquer sa gorgée nouée. Et s'excuser, encore.
Une fois que c'était fait, elle attendait sagement la visite quotidienne du médecin, assise bien droite sur sa petite chaise qui craquait à chacun de ses mouvements. C'est qu'elle ne quittait pas ou peu son armure. Elle lui laissait faire son travail sans piper mot, fixant d'un regard sombre chacun de ses gestes. Lorsqu'il terminait et faisait mine de repartir, elle se levait subitement pour lui bloquer l'accès à la porte, et le pressait de questions auxquelles elle ne recevait aucune réponse concrète. L'ambiance finissait par être pesante et morose dans la petite chambre.
C'est à ce moment-là qu'elle décidait d'agir. Elle prenait un linge, préalablement humidifié et consciencieusement essoré, pour faire la toilette de mademoiselle.
Elle tamponnait avec peur le cou, les bras, chaque partie accessible sans dévoillé le corps de la jeune femme, et terminait avec le visage pour lequelle elle faisait preuve d'une douceur particulièrement. Ensuite elle la coiffait. Non pas que mademoiselle avait besoin d'être recoiffée tous les jours, au vu des mouvements quasi inexistant de sa tête, mais c'était une activité apaisante que de passer un petit peigne, voir ses doigts dans sa chevelure pour la remettre en place. Shalna se devait d'être présentable, non ?
La remarque qu'elle lui avait fait la remarque un jour, de son manque de coquetterie et d'un laisser-aller flagrant qui n'avait pas manqué de la vexer. Au moins, il n'y aurait rien à redire maintenant.
Finalement elle reprenait son poste d'observation, assise sur le sol dur de pierre, adossée au lit. Et elle se mettait à parler.*

- Je ne sais toujours pas si tu m'entends. Peut-être que je parle dans le vide. Ou que tu entends un mot sur deux, et dans ce cas là, tu ne dois rien comprendre. Peut-être que tu ne veux pas comprendre. Je m'excuse sincèrement si mon babillage t'exaspère. Je devrais sans doute me taire, mais je deviendrais folle si je ne parle pas. D'ailleurs, Je pense que le médecin, le plus jeune, celui dont je t'ai parlé lundi, me prend pour une folle. Il me lance toujours un drôle de regard, quand il se rend compte qu'il n'y a que toi en plus dans la pièce. *un silence, avant de recommencer son monologue*

Je regrette qu'on se soit éloignée, ces derniers temps. Je ne suis pas bête, tu sais. J'ai bien remarqué que tu ne savais plus comment m'aborder. Je ne t'ai pas aidé avec ça, j'en suis désolée. Je... J... Je sais, que tu me cachais des choses. Monsieur Owen, qui t'a sauvé, a dit que tu semblais avoir tout prévu. Monsieur Kei semble dire la même chose, même si j'évite de le contacter en ce moment. Je n'ai pas envie de leur parler, ni même de les voir. Tu sais... N... Nous aussi, on avait prévu des choses.On ne comptait pas te laisser mourir, même si on a... Même si on a été inefficace. On a échoué, encore une fois. Mais... Mais pourquoi ?
Pourquoi ne m'as-tu pas parlé de Valfor ? De tout ça ? De Fuzelle ?
*Une inspiration, sa voix se fait plus dure, presque colérique.*

-Hyrelia est intervenue pour te sauver. Elle n'a pas mis ses menaces à exécution. Je sais que tu... Je sais qu'elle te manque. Et que tu t'inquiètes, pour elle. Je ne connais pas votre histoire, mais tout le monde dit quevous avez été très proche. Elle... Elle fait une bonne protectrice. Je l'envie. Tu devrais peut-être la reprendre à ton service... Elle sera plus efficace... Je suis morte, moi aussi, tu sais.*murmure* Je sais que tu ne savais pas comment venir me voir. Ils me l'ont dit, les autres de l'escouade. Cette mission, tu sais, elle... Elle m'a... J'ai vu des choses que j'aurais aimé ne jamais voir. Je t'ai vu comme j'aurais aimé ne jamais te voir...
J'ai tué, aussi. Tu l'ignore,tu étais au sol, avec Ji. Mais j'ai tué un être humain, pour la première fois. Volontairement. Ils pensent que j'étais sous le coup de colère, que je ne m'en souviens pas forcément. C'est faux. Je savais que ce dernier coup allait le tuer. Je savais que je le poussais vers la falaise. Je voulais qu'il meurt.
Tout comme je voulais tuer Chambertiaux. Un coup net, propre, dans la tête.
Je me hais.

*Lorsque des moments comme ça arrivait, des moments de pures confessions, elle prenait pour habitude de se relever et de s'étirer longuement, comme si de rien n'était.Elle priait dans son for intérieur que Shalna ne l'entendait pas réellement. Ou au contraire, peut-être, qu'elle l'entendait et qu'elle comprenait. Ca dépendait des jours, et de la confession en question.Elle laissait de longues minutes s'écouler, avant de s'installer à la petite table pour s'occuper de son travail dans l'escouade. Ca l'occupait quelques temps, et lui permettait de se vider la tête.Ecrire des lettres, envoyer des rapports. Elle devait écrire à Owen, maintenant qu'elle y pensait. Mais le travail manquait vite dans ce genre d'instant, et quand elle était sûre que tout était fini, qu'il n'y avait personne, aucune visite, elle se réinstallait à son emplacement favoris, et reprenait la parole, sur un ton qui se voulait enjoué*

- Tu dois vivre Shalna. Tu dois vivre, non pas pour Hylla, non pas pour cette guerre qui finira forcément un jour... Ni même pour moi, ou tes amis. Tu dois vivre pour toi, et pour le bel avenir qui t'attend dans quelques années, lorsque nous aurons tout réglé. Je sais que... Je sais que c'est facile à dire maintenant, comme ça. Mais imagine-nous !
*Elle semblait alors reprendre un peu de vie, s'agitant, mimant avec ses mains même si la petite demoiselle ne pouvait pas la voir*
Imagine-nous ! Tu seras mariée à un homme grand et fort, un gentleman parfait qui te fera rire, et qui s'émerveillera de chacune de tes maladresses, parce que comme il le dira "c'est adorable !". Tu auras une petite maison, en campagne. Je ne sais pas pourquoi je t'imagine vivre en campagne. Le grand air te ferait sûrement du bien en fait. Tu auras une petite fille, un peu colérique, elle tiendra ça de toi. Excuse-moi, parfois, tu es insupportable Shalna. Mais elle sera tout aussi belle et intelligente. Elle dansera. Ou un garçon ! Un petit garçon avec une petite lance, qui sautera partout ! Tu passeras ton temps à lui courir après.
Les deuxn en fait. Oui, les deux. Tu aurais les deux.
Le dimanche, toute la petite famille se mettra en route vers Uldah pour venir rendre visite à tante Aranael. On se retrouvera avec plaisir, dans nos plus beaux habits, mal à l'aise à cause de la chaleur et du soleil. Alors, Je nous installerais dans la véranda qui donne sur le jardin, où nos enfants s'amuseront ensemble à sauter et gambader. On les regardera, attendries,parce que toi et moi nous sommes deux mères poules. Parfois ils se disputeront, et nous devrons les séparer, ce qui ne manquera pas de nous amuser.Nous parlerons de tout et de rien, de la pluie, de nos maisons, de nos amis, et parfois du bon vieux temps. On rira ensemble, comme on le fait encore de temps en temps, toi et moi, ou on aura des moments de silence, sans rien se dire. Nos maris ne comprendront peut-être pas forcément, mais ce n'est pas grave parce que c'est quelque chose qui n'appartiendra qu'à toi et moi.
Je t'offrirais deux tasses de thé. La première pour que tu puisse boire, et la seconde pour que tu y trempes tes biscuits en y laissant toutes les miettes que tu veux sans que ça ne gâche. *cette idée semble la faire rire, un vrai rire, pendant quelques minutes* Ensuite j'insisterais pour que tu restes dîner avec ta famille. Tu refuseras d'abord, mais tu finiras par accepter pour me faire plaisir. Tu ne m'as jamais rien refusé, quand j'y pense. Tu essaye toujours de me rendre heureuse. Tu penses peut-être trop à notre bien-être, en oubliant le tien, tu sais.
Et pendant que nos maris prépareront le repas, nous, nous mettrons des petits cubes d'aliments sur des piques. Tu n'y toucheras pas mais tu seras très fière de toi, lançant à la cantonnade que c'est artistique.Et  quand il se fera tard, que les enfants se seront endormis sur le canapé, que nos maris se donneront une poignée de main franche avant d'emporter les enfants,je te prendrais dans mes bras et te serrerait fort. C'est ce que font les amies qui se disent au revoir. Je te regarderais partir dans la nuit, au bras de l'homme que tu aime, et te lancerait un dernier

"à la prochaine, Shalna."

*Silence. Une... Deux... Trois... Quatre... Cinq... Plic. Plic. Une larme, deux larmes, trois larmes... Et toujours le silence. "A la prochaine Shalna". Ses genoux se ramènent vers sa poitrine, ses mains sur son visage. "A la prochaine Shalna !". Quatre larmes, cinq larmes... Son corps tressaute sans un bruit sous les sanglots qu'elle étouffe. Le temps passe, et rien ne bouge, rien ne change.
S'étrangler en essayant d'avaler un autre bout de pain. S'allonger sur le matelas de fortune, installé à côté du lit.
Fermer les yeux.*
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Message par Aranael Mar 2 Juin - 20:03

* Le froid transperce tout. L'armure, la peau, les os et même son esprit.
C'était intenable. Le temps était intenable. Elle traversait le camp rapidement, courant presque, laissant une large traînée de pas immenses derrière elle, dérangeant cette pauvre neige immaculée qui s'amoncelait doucement. L'infirmerie n'était pas très loin. Elle entra dans un grincement de porte qui lui arracha une grimace. Elle détestait avoir cette impression de déranger un lieu où peu de bruits filtraient. Il faisait bon à l'intérieur, la neige fondait rapidement. Elle salua deux ou trois infirmières qui semblaient l'avoir prise en pitié, et monta les escaliers lentement. Une marche, deux marches... Clac clac. Le bruit de ses lourdes bottes de métal semblait assourdissant contre la pierre. Elle aurait dû penser à mettre une autre armure, quelque chose de plus discret. A moins que le bruit ne la réveille ? Non, c'était idiot. Un nouveau bonjour, un signe de main, un hochement de tête, quelques questions. Rien n'avait changé, mis à part une confiance relative qu'elle plaçait désormais dans le personnel soignant.

Kaerell devait être parti, à l'heure qu'il est.
Un silence, une respiration avant d'entrer dans la petite chambre. Rien n'avait bougé, ni le lit, ni le bureau... Ni mademoiselle. Son petit corps reposait toujours au même endroit, couvert pudiquement par une couverture, laissant seulement la tête dépasser. Elle semblait morte, et pendant un instant, cette idée terrible faillit la faire défaillir. Mais le drap se soulevait lentement, au rythme d'une respiration faible. Soupir. Il fallait qu'elle se reprenne, qu'elle avance. Une jambe, puis l'autre, pour oser s'approcher.*


-Bonjour, Shalna. Comment vas-tu, aujourd'hui ? Kaerell s'est bien comporté ?

* Elle savait qu'elle n'obtiendrait pas de réponse, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de continuer de lui parler. Encore. Elle vérifia que ses mains n'étaient pas froides, avant de la toucher. Rituel quotidien depuis une semaine maintenant.

- Nous avons quelques pistes, tu sais. On cherche. On essaye de comprendre. Ce n'est pas facile, et l'escouade semble un peu perdue. Il y a des tensions, tu dois l'avoir entendu. Mais on travaille ensemble. On ne laissera pas tomber. J'ai parlé avec Ji aujourd'hui, je crois qu'il passe trop de temps à se blâmer. Parfois, je me dis qu'il me ressemble. Ca me fait presque peur. * Un sourire.* Nous avons peut-être une piste pour te sortir de là. Je ne sais pas. Je... Les élémentalistes m'ont donné une potion. Une potion de réveil. Je vais te la donner, en espérant que ça marche.

* Sa voix faiblit tandis qu'elle essayait d'y mettre un peu de conviction. Les médecins eux-même ne semblait pas y croire. Bien sûr, ils avaient des plans de rechange. Mais rien qui ne plaisait vraiment à Aranael. Des choses dangereuses, des choses difficiles. Si seulement...
Un nouveau soupir, avant de soulever le plus délicatement possible le buste de mademoiselle. Sortir la potion, la déboucher d'une main.
Elle avait envie de fermer les yeux et peut-être même de se mettre à prier, lorsqu'elle versa le contenu dans sa bouche. lentement, goutte par goutte... Laisser le temps au liquide de couler.
Ensuite attendre. Ca n'agissait pas instantannément, bien sûr. Elle était bête de guetter comme elle le faisait une réaction. Ca ne marcherait pas. Qu'est-ce que monsieur Ji lui avait dit, déjà ? Ha, oui. Ce n'est pas un sommeil, mais un coma.
Une déception, une déception sans nom en reposant sur le matelas le corps qu'elle tenait. Quelles options s'offraient à eux ?

Une idée... Une idée... Une idée !

Kaerell en avait parlé. Bien sûr, elle avait beaucoup lu à ce sujet. Elle était pratiquement une spécialiste, si elle pouvait se permettre ce terme. Non pas qu'elle avait beaucoup pratiqué, loin de là en fait, mais elle avait lu tout ce qu'elle devait, et son savoir s'étendait loin sur la question. Certes, elle n'était pas exactement non plus la bonne personne.
Mais est-ce que le physique compte vraiment dans ce genre de cas ? Est-ce que le statut compte aussi ? Shalna est bel et bien une princesse. Mais... Il existait, d'après les livres, des exceptions.

Ce qui compte réellement, ce sont les sentiments.
Cette idée la faisait rougir. Elle n'était pas amoureuse de mademoiselle. Trop petite, trop... Trop fille. Elle avait fait un rêve étrange une fois, avec une petite blonde qui se déshabillait devant elle, mais est-ce que ça comptait vraiment ? Ce n'était pas ce genre de sentiment qui l'animait lorsqu'elle pensait à Shalna, loin de là. Non, c'était autre chose, n'est-ce pas ?
Mais de tous, n'était-elle pas la plus à même de mener cette mission ? Cette tentative ? C'était elle qui...
Un nouveau rougissement pendant qu'elle jetait des regards nerveux vers l'arrière, vérifiant soigneusement que personne ne passait. Jamais. Personne ne devait savoir.
Sa respiration s'accélèrait pendant qu'elle fixe le visage devant elle. Est-ce que ce n'est pas interdit ? Shalna lui en voudra, sans doute, si elle s'en rend compte... Mais si ça la réveille ? Comme dans les contes.
Elle se pencha un peu plus, ses yeux se fermant instinctivement. Oui, c'est comme ça qu'ils font dans les histoires. De là où elle était, elle pouvait presque sentir le souffle de mademoiselle sur le sien. Encore quelques centimètres.
Sa bouche effleurait ses lèvres. Sa respiration se bloquait dans sa gorge, hésitante. Un mouvement de recul.
L'embrasser maladroitement. Ce n'était pas de ces baisers de prince charmant, ces baisers d'amoureux transis que l'on peut voir. C'était un baiser timide, pas très sûr, de ses lèvres qui se pressaient contre les siennes pudiquement, presque furtivement, avant de se séparer comme si elles brûlaient.

Battement de cils. Sa peau sombre tournait au cramoisi, ses mains se plaquèrent sur son visage. Elle se leva d'un bond, avant de sortir en courant de la pièce. Descendre les marches 4 à 4, passer la porte comme un courant d'air.

C'était une idée bête.*
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Message par Aranael Mer 19 Aoû - 10:29

Chronique d'escouade: Aranael Emerald

L'amitié


Elle se souvenait précisément du moment où son admiration polie pour Mademoiselle s'était transformée en un sentiment plus fort.
Pas de l'amour, non, même si l'avenir arrivera à la faire douter de la teneur exacte de ce qu'elle ressentait. Ils venaient de rentrer de leur première mission à la tour. L'exploration d'une grotte un peu perdue à flan de montagne, où ils devaient retrouvés des cargaisons d'équipements volés. Une mission simple en apparence, qui avaient rapidement mal tournée lorsque les premiers cris de dragon avaient résonnés dans le blizzard qui faisait rage, les empêchant de ressortir pendant un moment. Ca puait la mort, il y avait des traces de lutte. Un tonneau s'était mis à bouger, et par réflexe, elle avait frappé d'un coup net de hache, la plantant à travers le bois. C'était la première fois que son arme rencontrait la chair molle d'un être humain. Elle avait hurlé quand la gerbe de sang avait jailli, avant de tout lacher et de tomber à la renverse. Il n'y avait qu'une tête. Une tête qui bougeait encore.

Elle se souvient de la peur de l'escouade entière, quand ils sont repartis en courant, oubliant dragon et bon sens, emportant une simple épée rouillée comme preuve de la mission. La main de Mademoiselle qui serrait la sienne, pour tenter de la rassurer, discrètement. Elle était ensuite aller s'enrouler dans ses couvertures, fixant avec terreur les escaliers, et la porte qu'elle apercevait de son perchoir. Mademoiselle l'avait rejoint silencieusement et lui avait ôté son manteau tâché par le carnage avant de la masser, tentant tant bien que mal de la détendre. Une ou deux paroles réconfortantes, à peine murmurées avant de se replonger dans le silence. Elle l'avait ensuite enroulée dans sa couverture et allongée sur sa couche de fortune, à même le sol. Elle avait pris place à ses côtés.

Le souvenir était vivace. Elle s'était cachée dans ses couvertures, et juste avant de s'endormir, avait senti un petit corps venir se coller contre son dos, et serrer fort les draps. Elle n'était pas la seule à avoir eu peur ce soir là. Elle venait de comprendre que son engagement serait bien plus difficile que ce qu'elle avait imaginé en s'engageant, en déménageant dans cet endroit inhospitalier. Mais elle n'était pas toute seule. C'était ce moment précis, cette seconde où elle avait senti ce corps tout coller. A ce moment-là, elle comprit qu'elle avait une amie, un être spécial, quelqu'un à suivre non pas par admiration, par ce fantasme des Chevaliers, mais par amour. Une cause juste, défendue par une toute petite demoiselle qui faisait elle aussi ses premiers pas dans la guerre, c'était une belle idée. Elle avait vu en Mademoiselle une personne pure et innocente. L'idée lui plaisait. Elle la suivrait.

L'amour

Il n'était pas exactement le genre d'homme qu'elle admire. Pas tout à fait. Certes, il était grand et fort. Mais pas une montagne de muscles, plutôt le genre fin et sec. Elle préfèrait les montagnes bien dessinées. Il ne portait pas encore de belles armures, mais il s'y intéressait, et ça avait éveillé un intérêt chez elle. Curieux, c'était bien le mot qui collait à ce drôle de sauvage naïf, qui découvrait une civilisation bien différente de la sienne. Il ne connaissait ni la pudeur ni la douceur. Juste la guerre, le combat et surtout "la chasse" comme il se plaisait à dire. Ce drôle de numéro la gênait parfois dans ses actes, et ses paroles, mais le plus souvent, il l'amusait.
C'était rafraichissant de lui parler. Elle qui avait toujours vécue dans la principale ville marchande, le choc culturel était une sacrée épreuve. Elle aimait se battre à ses côtés. Il faisait toujours de grands discours sur la famille, sur le clan, sur l'amitié. Elle pensait avoir jusqu'alors le monopole de ce rôle, mais elle avait trouvé en sa personne un maitre en la matière. Il lui plaisait.

Ce jour-là, il partait traquer seul SA proie à ELLE et elle ne l'acceptait tout simplement pas. Hyrelia était son adversaire, il était hors de question que ce petit nouveau l'attrape à sa place. Elle le suivrait donc, ça lui ferait un entrainement, parce qu'elle ne pensait pas réellement qu'ils la trouveraient. Mais ils l'avaient trouvée. Elle n'avait pas voulu se battre malgré sa lame pointée vers eux. Il avait d'abord tenté de l'affronter, avait changé de tactique pour se mettre à lui parler, beaucoup et soudainement, il s'était jeté sur elle. La lame l'avait traversé comme un couteau dans une motte de beurre fraiche. Il n'avait pas bronché, fier, essayant d'enlacer la tueuse pour appuyer ses propos. Quelques secondes ou minutes de battement, avant qu'Hyrelia ne retire son arme et disparaisse. Il s'était effrondré, un filet de sang sur les lèvres. Elle l'avais pris dans ses bras, paniquée, essayant de siffler sa monture pour l'emporter au plus vite. Il l'en empêcha d'une parole, il ne voulait pas bouger. Au bord de la mort, cet homme naïf demandait le luxe insensé de rester dans ses bras quelques instants.
La voilà amoureuse.

La mort

Le combat durait depuis un moment déjà, bloqués qu'ils étaient par une barrière magie. Monsieur Gaedon tentait de retenir le monstre, avec la force du désespoir. Son bouclier gisait dans un coin, son armure était dans un état lamentable. Monsieur Ishmael était à ses côtés. Il avait déjà subi plusieurs assauts violents, dont l'un qui l'avait envoyé valser au loin. Monsieur Sakopi tentait de protéger Ji et Mademoiselle qui, terrorisés, se tenaient dans le coin le plus éloigné de la salle. Elle les distinguait vaguement du coin de l'oeil. Les cuves, illuminées, renvoyaient des images de monstres apocalyptiques. La créature, immense, bâtie comme un roc, les ailes déployées, riait. Il venait de l'attraper à la gorge, et serrait de toutes ses forces. Elle entendit le léger craquement de sa nuque qui allait se rompre sous le choc. Ses yeux s'injectèrent de sang, son souffle se fit de plus en plus bref. Réagir. Un nouvel assaut de ses camarades, pour la libérer. Il finit par la laisser tomber au sol, inerte, tandis que le monstre se tournait vers ses compagnons dans un but de vengeance. Sa vue était maintenant brouillée. A peine voyait-elle la poussière du sol se soulever. Sa hache était là, juste à portée de main, chauffée à blanc par un crachat du monstre. Elle avait mal au crâne, ça bourdonnait. Elle n'entendait plus que ça d'ailleurs. Lorsque sa main se posa sur son arme, elle sentit la chaleur la brûler à travers le gant. Elle allait mourir.

C'est la seule pensée qu'elle eut lorsqu'elle saisit le manche un peu plus fermement. Elle allait frapper une dernière fois, et il la tuerait.

Mais si ça permettait au reste de l'équipe de l'achever, de s'enfuir, elle ne devait pas attendre. Papa serait sûrement fier d'elle. Elle savait que Gaedon et Ishmael était juste à côté. Elle ne doutait pas d'eux, infaillibles qu'ils étaient, à se dresser pour protéger les autres épaules contre épaules, véritables murailles inébranlables et vivantes. Elle était encore impressionnée de les avoir vu ainsi. Non vraiment, elle n'avait aucun doute. Ils sauraient profiter de la situation qu'elle allait créer. Elle leur confiait la suite.Alors, se dressant sur ses genoux devant la bête,chancelante, elle leva comme elle pu son arme et dans un coup sec, l'enfonça dans le torse du monstre. Sa réaction à lui fut bien plus rapide, et d'un simple revers de main, il la giffla.
Sa tête fut propulsée sur le côté. Flottement. Elle n'entendait toujours pas, ne voyait plus qu'une image floue, des couleurs mouvantes.
Shalna.
Elle s'effondra sur le côté, terrassée. Son crâne s'était sûrement détachée de son corps sous la violence. C'était la seule explication aux sensations qu'elle ressentait maintenant.
La douleur puis plus rien du tout. Elle était morte.
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Message par Aranael Jeu 20 Aoû - 15:48

La peur

Elle était bourrée de peurs. Ca variait de la plus simple comme celle des singes, à la terreur que pouvait lui inspirer la disparition de Shalna. Elle n'avait jamais été très proche des gens, tout au plus les voyait-elle comme de bons collègues. Parfois, une amitié se formait et avec ça les problèmes. Elle s'inquiétait beaucoup trop.
Beaucoup dirait que comme tout le monde, elle avait peur de la mort. Ce n'est pas tout à fait exact. Elle ne voulait pas mourir, bien sûr, mais son dévouement la transcendait suffisement pour aborder cette possibilité sereinement. Elle pensait déjà être morte une fois pour le groupe, l'idée de recommencer ne la dérangeait plus. Non. Par contre elle avait peur de souffrir et de ne rien pouvoir y faire.

Il ne faut pas exagérer: c'était une guerrière. Elle était là pour les autres, pour prendre les coups, pour leur donner une chance.
Mais... Que faire lorsqu'on ne voit plus rien ? N'entend plus rien ? Lorsqu'on suffoque au point d'avoir l'impression que sa tête va soudainement disparaitre en explosant, et que plus aucun muscle ne répond à vos supplications muettes ?
Cet état la terrorisait. Elle l'avait vécu une fois, et le souvenir était vivace et douloureux. Lorsqu'on fait plus de deux mètres, lorsqu'on est une montagne de muscles, la trahison du corps est lourde à vivre.
Parfois elle se disait qu'elle aurait aimé que tout s'arrête à ce moment-là. Elle n'aurait plus jamais eu à penser. Elle n'aurait plus jamais eu mal.
Mais elle était toujours présente, et elle devait faire face. Cette peur n'était pas difficile à gérer au quotidien, parce que personne ne visait le haut de son corps pour le côté pratique. L'impression d'être un fantôme, elle avait réussi à la refouler au plus profond d'elle-même pour ne plus embarasser ses compagnons. La menace de rentrer chez ses parents à cause de son état planait encore, et c'était sans doute la dernière chose qu'elle voulait. Autant par dévouement pour la mission, que par respect pour ses parents. Elle ne voulait pas que papa et maman la voit comme ça.

Ce jour-là, elle avait voulu s'entrainer avec Monsieur Ishmael. Elle considérait qu'il était le seul dans l'escouade à présenter un défi à sa taille, en terme de combat de force. Bien sûr, elle savait bien qu'elle n'avait pas encore l'expérience suffisante pour le mettre définitivement à terre. Mais ne fallait-il pas justement s'entrainer pour y parvenir ? Il lui avait promis d'y aller à la mhigoise. Ca l'inquiétait et l'excitait en même temps. Elle adorait Ishmael (il ressemblait un peu à son papa et il était toujours là pour elle. C'était un ami d'exception), elle n'aimait pas ses pouvoirs ténébreux. Elle ne comprenait rien à la magie. La peur de l'inconnu.
Le combat avait lieu sur un petit promontoire enneigé, à l'écart de la ville.
Il n'avait pas menti. Il se jeta sur elle, entrant dans la danse par une violente tentative de décapitation. Ca la contrariait. Il n'y avait que 3 personnes qui connaissaient réellement son état, et il en faisait parti.
Elle eut du mal à dévier la lame. Il réussit même à enchainer un coup de coude dans le visage, la défigurant au passage.
C'était une escalade de violence. Il visait inlassablement son point faible quand elle peinait à le toucher. Il changeait, au fur et à mesure des échanges. Son aura se développait, et elle ne savait pas, sous cette forme, où se trouvait ses limites. Elle était déjà épuisée. Elle n'avait plus envie. Lorsqu'il failli lui envoyer une décharge dans la tête, changeant au dernier moment pour l'épaule, elle perdit pieds.
On dit que la peur pousse les animaux dans leurs derniers retranchements, et que c'est dans ces moments qu'ils sont les plus dangereux.
Elle était terrorisée. Par ces coups sur son crâne qui l'étourdissait, par la magie, par son état, et cet oeil d'un bleu limpide qui la fixait.
Ce n'était plus un combat, encore moins un entrainement. Elle luttait pour survivre. Pour qu'il ne la frappe plus. Pour que sa tête ne se détache pas une nouvelle fois.
Il finit par frapper fort, visant la poitrine afin d'aspirer son énergie. Elle se sentait de plus en plus faible, de plus en plus mal. Son bras ne répondait déjà plus, pendant lamentablement au bout de son épaule crâmée. Ses coups se firent de moins en moins puissant. Elle cédait, mais cette fois, elle s'était battue.

Elle n'était pas à genoux. Elle le voyait, l'entendait, ce monstre.

Victorieux, le sourire carnassier aux lèvres, il la souleva par la gorge, avant de la laisser choir à ses pieds, tombant lui même assis dans la neige. Ils se prirent dans les bras l'un de l'autre.
Ils pleuraient.
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Message par Aranael Ven 21 Aoû - 12:41

La confiance

Ca avait toujours été quelque chose de très important dans sa vie et ce n'était pas simple de la gagner. Ou plutôt, elle vous l'accordait d'entrée de jeu, se tenant prête à vous la retirer au moindre écart. Elle savait qu'elle était plutôt naïve, et le temps lui avait finalement appris qu'il ne fallait pas en faire trop avec les inconnus. Elle avait souvent été déçue, même par des gens qu'elle considérait comme des proches. Perdre sa confiance, c'était l'assurance de la voir se désintéresser de vous rapidement, ou au contraire, de recevoir une attention démesurée (en fonction de la menace que vous représentez à ses yeux).

Elle en avait énormément pour Monsieur Ji. Ca avait été lent: Ils avaient en commun la politesse excessive, le goût pour le travail droit, précis, et bien fait, ainsi que des peurs et des envies similaires. C'était un excellent soigneur, mais qui se sous-estimait. Elle qui avait tendance à frapper, elle trouvait qu'il la complétait bien. Ils s'étaient beaucoup rapprochés lors de la disparition de mademoiselle, puisqu'ils n'étaient plus que deux pauvres survivants dans une tour isolée, perdue dans l'immensité du Coerthas. La guerre était difficile. Les missions dangereuses. C'était désormais le plus ancien membre de l'escouade encore à ses côtés. Le roulement des effectifs était normal dans une guerre, et elle était contente d'avoir ce vétéran à ses côtés, avec qui partager son expérience.

Il était dépressif, et en ce moment, elle avait peur de le voir disparaitre à la suite de son mariage. Qui voudrait continuer à se battre tout en fondant une famille ? Maintenant qu'il goûtait un peu au bonheur, elle avait peur qu'il l'abandonne. Elle ne lui en voudrait pas, non ! Mais... Elle serait triste.

Elle était pudique, suffisement pudique pour ne pas laisser n'importer qui la toucher, la dévoiler (sauf à la plage. Tout est permis à la plage).
Lorsqu'elle était en colère ou frustrée, elle avait toujours des actes un peu irresponsables. La tour lui manquait, elle vivait mal la cohabitation dans le quartier général. Elle croisait moins les gens. Un éloignement naturel se faisait, elle ne le supportait pas.
Alors elle était repartie aux frontières, bêtement, afin de se battre sur tous les fronts. Un dragon avait réussi à l'attraper dans un coin, enfonçant profondémment ses griffes dans son dos, lacérant la chair après avoir détruit l'armure, laissant de longues entailles qui allaient de l'épaule jusqu'à ses hanches. Elle était rentrée en faisant comme si de rien n'était, après les premiers soins d'urgence. Mais il avait vite remarqué que ça n'allait pas.
Il l'avait rabrouée puis finalement, dans l'intimité relative des dortoirs, lui avait demandé de se déshabiller afin de la soigner. Beaucoup ne verrait qu'un geste banal d'un médecin sur un guerrier blessé. Pour elle, c'était une épreuve. Aucun homme ne l'avait vue à moitié nue. Aucun homme n'avait touché sa peau, même pour un soin. C'était une première.

Elle avait longuement hésitée avant de retirer son haut, couvrant pudiquement ce qu'elle pouvait d'un drap. Il avait détourné la tête, et n'avait pas fait mine de bouger jusqu'à ce qu'elle lui dise qu'elle était prête.
Ses gestes avaient été très lents et très délicats. Il avait pris soin de ne pas la toucher plus que nécéssaire, étalant soigneusement le baume, lui assurant qu'il n'en resterait plus rien dans quelques jours. Professionnel, consciencieux. Il l'avait écouté se plaindre sans l'interrompre.
Puis, une fois le travail fini, il s'était levé, éloigné, et n'avait jamais reparlé de cet épisode depuis.

Elle lui faisait entièrement confiance confiance. Il ferait le bon choix.
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Message par Aranael Sam 7 Nov - 19:50

"Clac clac cliclic squouick. Clac. Fssh."

Les ciseaux coupent, coupent, coupent, impitoyable dans la tignasse. Ils coupent court, de sorte que même si elle n'est pas coiffeuse de profession, on ne verra pas les maladresses.
Les mèches autour d'elle volent, volent, volent, avant de s'échouer sur le sol.

"Clac clac cliclic squouick. Clac. Fssh."

Elle a le coeur au bord des lèvres, et ses mains tremblent. Le miroir lui renvoie une image brouillée, une mine fatiguée, tirée, anxieuse. Elle regrette déjà un peu ce choix. Elle sait que les remarques vont pleuvoir dés qu'elle sortira de la pièce, dés qu'elle exhibera fièrement son travail. Mademoiselle froncera peut-être le nez. Lui... Lui... Elle sait qu'il aime les cheveux longs. C'est sa réaction qu'elle redoute le plus. La trouvera-t-il encore belle ? Séduisante ? Mais pour demain...

Pour demain, elle veut être parfaite. Elle a choisi en connaissance de cause. Depuis des heures, elle s'occupe de son corps inlassablement: Se détendre, masser les muscles. Avoir les ongles courts. Vérifier que tout va bien. Panser les petites plaies, les petits bobos, les cicatrices qui couvrent son corps. l'étape finale, le sacrifice de sa crinière.
Papa disait toujours qu'un guerrier avait les cheveux coupés nets. C'est pratique, ça n'encombre pas, ça dégage. Pour demain, elle ne voulait que rien ne puisse, à aucun moment, la gêner. La moindre erreur sera sans doute fatale.

Elle repose l'accessoire sur le meuble, frotte sa tête rapidement avec un linge, s'examine à nouveau. Pas de maquillage. Pas d'ornement. Ca lui fait un air sévère, ça la rajeunit.
Juste la gemme qui brille sur son front. Maman l'avait choisi dorée cette fois-ci, brillante. Elle sourit, rassurée. Si son corps lache, son esprit lui, sera toujours protégé. Maman l'a dit. Maman a précisé que c'était un talisman "pour que ton esprit ne flanche jamais.". Elle ne flancherait plus.
Elle se retourne en soufflant fort vers son lit, contemple un instant pensive l'armure, et la lourde hache posée à côté. Aucun hasard. Elle avait mis un très long moment à décidé, face à son impressionnante collection. En dehors de sa coquetterie, laquelle conviendrait le mieux pour cette mission ? Pour mourir ? Non, pas pour mourir. Pour flamboyer...
Elle revérifia le matériel, les sangles, la maille, le metal, l'ajustement, le tranchant de l'arme, le cuir... Tout, encore, et encore. Plus elle y pensait, et plus elle se disait que ça ne pouvait être que celle-là, pour cette mission.

Demain, elle sera or parmi l'or.
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Message par Aranael Lun 9 Nov - 19:41

Le cri sortit sans prévenir, d'un coup. Un hurlement de douleur qu'elle prolongeait au maximum de ses capacités, jusqu'à la limite du tenable, à s'en faire exploser les poumons et s'en déchirer les cordes vocales. Une veine palpitait sur son front rougeaud tandis qu'elle s'égosillait, fracassant d'un poing rageur le lit de bois qui ne tarda pas à céder sous les coups frénétiques.
C'était parfait. Puisqu'il ne pourrait plus jamais se glisser dans ses draps, ce lit devait disparaitre. Elle n'accepterait jamais que quelqu'un d'autre y dorme à sa place. Et elle refusait d'y retourner sans lui. Alors, elle le détruisait méticuleusement de ses propres mains, quitte à saigner, quitte à se couvrir d'échardes, quitte à s'arracher la peau et les ongles. Tout ce qui ressemblait à du tissu, elle le déchira dans de larges gestes avant d'aller le jeter au feu. La commode fut vidée en un clin d'oeil, et retournée sur le sol. Son tableau du déctective, elle le lacéra jusqu'à le réduire en un monticule de lambeaux.
Quand le cri commença enfin à faiblir, à s'atténuer jusqu'à ne devenir qu'une plainte étouffée et rauque, à peine un souffle entre ses lèvres, que son expression se figea finalement dans une terrible grimace de souffrance muette, elle arrêta le carnage.

La première larme coula à gauche. C'était une toute petite perle très salée, qui creusa un sillon sur sa joue, presque avec timidité. Une seconde suivit de près. Puis une troisième. Deux de plus. quatre.Une rivière. Un fleuve.
Un flot ininterrompu se déchainait en cascade de ses yeux jusqu'à son menton, avant de chuter dans le vide et de s'écraser sur le sol de pierre dans un "plic" pathétique.CA s'était transformé en un gros sanglots. De la fière guerrière, il ne restait plus qu'un amas de morves et de larmes, de gémissements étouffés et de griffures convulsives, qui chialait, prostrée dans un coin. Elle essayait depuis hier de dire son nom, mais rien ne sortait. Il restait coincé quelque part dans sa gorge, l'étouffait, la rendait malade à en vomir. Elle ouvrait pourtant grand la bouche, inspirait de grandes goulées d'air, comme si c'était les dernières, pour tenter de le prononcer dans la perle qu'elle avait gardé précieusement. Mais rien. Ca l'asphyxiait.

Personne ne lui avait jamais dit, que ça ferait aussi mal. Si elle avait su, elle aurait peut-être réfléchi un peu plus. Fais plus attention. Ca venait par vague depuis la veille. D'abord, elle avait refusé. Puis elle avait essayé de parler mais il n'y avait que le silence autour d'elle. Elle était finalement retournée le voir et ça avait été une grave erreur qui l'avait achevée. Depuis, elle alternait entre l'épuisement bienfaiteur qui la jetait au sol, et le moment où elle repensait à lui, pour se tordre de douleur.C'était insupportable. Ca lui trouait la poitrine. Lui retournait les tripes. Elle n'était pas prête à vivre ça. Elle aurait pu l'éviter. Et cette idée, plus atroce que tout, la déchirait de l'intérieur. Elle lui en voulait d'avoir fait ce choix. Elle leur en voulait, à tous.

J'ai mal. J'ai tellement mal.

Elle adorait son manteau. Elle le trouvait magnifique dedans, sans trop savoir pourquoi. La couleur. La coupe peut-être. Son air sûr de lui quand il le portait. Il y avait encore son odeur qui flottait, quand elle l'enfila. Il était un peu grand pour elle... Depuis quand avait-il une carrure comme ça ? Mais elle se sentait en sécurité.
C'était son manteau. Son manteau. Son manteau. Son manteau à lui.
Elle ne voulait plus le quitter. L'illusion, passagère, de le sentir encore autour d'elle. Elle empocha le petit carnet, ajusta le collier. Les seules choses qu'elle garderait de lui. Ces trois objets, rien d'autre. Le reste, elle le brûlera.

Elle quitta la pièce sans aucun regard, en frissonnant, déposa ensuite un mot sur le bureau de Shalna, un simple "je reviens" à côté du tournesol fané. Papa, Maman. J'ai mal. Il est parti.

"Notre histoire a duré le temps d'une traque.
Tu m'as séduite le jour où on s'est lancé après la proie, Hyrelia.
Tu m'as quittée le jour où on l'a capturée.
Ta mission est accomplie, chasseur, et c'était une très belle chasse.
Au revoir, Ganzorig."

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Dernière édition par Aranael le Dim 22 Nov - 23:12, édité 2 fois
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Message par Aranael Jeu 12 Nov - 17:46

Le plus dur, c'est l'attente. Dieu, qu'il est long d'attendre. Maman essayait de faire la cuisine, mais je le vois bien quand ça va pas. Parce que c'est toujours fade. Et là, elle a déjà oublié le sel. Elle n'a même pas pris la peine de sortir le piment, c'est un signe. On va encore manger du sans goût. Mais j'peux pas lui en vouloir. Maman a bien raison d'avoir peur. Moi aussi j'ai peur pour mon bébé. Je sais que c'est ma faute, j'l'ai poussée. Maman me le reproche souvent. Mais moi, j'suis fier de ma princesse. Elle est grande. Elle est forte. Et elle a un but et une mission.
De toute façon, je suis pas prêt à être grand-père.
Et donc là, on attend. Et c'est long. Un signe. Une parole dans la perle. Elle aurait déjà dû répondre, il est tard maintenant. Alors on a un peu peur. Et on s'occupe, pour oublier. J'en suis déjà à mon cinquième napperon. Pourquoi des napperons d'ailleurs ? Je devrais lui tricoter une écharpe, il fait froid là-bas. Oui. Je vais faire ça. Une écharpe. Verte. J'aime bien le vert. Sacré Sacred, tu as toujours de bonnes idées !
J'ai entendu la porte s'ouvrir. Un tout petit grincement, presque imperceptible. Ha ! Heureusement que t'as encore de bonnes oreilles, que je me suis dit. J'ai sauté sur mes jambes, je me suis précipitée, suivi de près par Maman. Fifille est rentrée ! C'est ma fifille ! C'est ma f...
Ma fifille pleure. Elle est là, et elle pleure. Pourquoi elle pleure ? B.. Bah...
Je suis restée planté là, les poings serrés, abasourdi. Maman a réagi vite. Elle l'a prise dans ses bras, lui caresse les cheveux, la rassure, avec tout son amour maternel. On a échangé un regard, on a compris.
J'ose pas demander.

Jour 1
Elle crie, beaucoup. Je ne sais pas où son corps va chercher encore de l'eau pour pleurer. On a pas fermé l'oeil de la nuit, on se relaie, mais c'est pas facile. Ca vous déchire le coeur de voir ça. Ca vous brise de ne pas pouvoir agir. On peut rien faire hein ? J'peux rien faire pour ma fifille.
Ishmael est passé. Il l'a entendu, hurler, pleurer. On s'est regardé, on s'est assis, on a pas dit grand-chose. Y'a rien à dire. Rien. J'ai pris deux verres, j'ai sorti mon meilleur Whisky. On boit pas d'habitude. Un guerrier, ça boit de l'eau, faut que ce soit sobre.
Cul sec.

Jour 2
Elle n'a pas bougé de son lit. Pas mangé. Je crois qu'elle a fini de s'épuiser. Elle fixe le mur sans rien dire, totalement apathique. On se relaie toujours avec maman, elle veut attendre encore un peu avant d'appeler à l'aide. Je devrais peut-être contacter l'escouade. Je devrais intervenir, c'est ce qu'on fait quand on est papa. Mais je ne sais pas quoi faire.

Jour 3
Je lui parle. Je ne sais pas si elle m'entend, mais je lui parle. Je vois qu'elle réagit encore, à certains mots, le docteur a dit que c'était bon signe. Elle n'a toujours pas bougé. C'est long. Elle ne peut pas rester comme ça. Je ne le supporterai pas longtemps. Le docteur, il a dit qu'elle devrait se concentrer sur autre chose. Il est con. On ne se concentre pas sur autre chose quand on perd ça. On ne pense pas à autre chose. Non, en vrai, il a raison. C'est juste... Impossible. Je sais qu'on va en avoir pour longtemps.
Aranael, pourquoi est-ce que tu te détruits comme ça ?

Jeudi
-Lève-toi.
Je tente, j'essaye. Une réaction.

-Debout Aranael.
Elle fixe toujours ce foutu mur. J'aimerais l'abattre. Crétin d'aora. Tu pouvais pas prendre ta saloperie de retraite une semaine plus tôt ?

-Aujourd'hui, il y a réunion. Ton escouade déménage. La vie continue, sans toi. Lève-toi, Aranael.
J'aimerais cramer l'escouade, et leur quartier général. Le bien d'Eorzéa, c'est le bien de ma fille. Vous faites mal votre travail. Elle est où Mademoiselle Seledor ? Regarde ma fille ! Regarde-là ! Fais quelque chose ! Pourquoi je m'obstine moi d'ailleurs, à vouloir la relever ? Parce qu'elle va regretter. Ca va l'achever. Elle ne se pardonnera pas. Elle était pas prête, putain. Mince. Langage, pardon.
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
-lève-toi.
Il tente, il essaye. Il attend une réaction.
Je n'entends pas. Laisse-moi.

-Debout, Aranael.
Je ne vois rien. Je ne me souviens de rien. Je n'ai pas envie. Je vais juste rester là, pour toujours.

-Aranael, il y a réunion. Ton escouade déménage. La vie continue, sans toi. Lève-toi, Aranael.
Réunion. Réunion. Réunion.
Jeudi. On est jeudi. On est seulement jeudi ? Pourtant moi... J'ai l'impression que ça fait des années que je suis là. Et en même temps... Que ça c'est passé il y a cinq minutes. Mes yeux picotent. Je n'arrive plus à pleurer. Ni à bouger. Ni à hurler, je n'ai plus de voix. Je ne veux pas parler papa. Laisse-moi, papa.
La vie continue... Sans lui. Sans moi ? Sans moi. Mais ils ont besoin de ... Ha. Non. Il y a Hyrelia... Hyrelia... Je dois la voir. Comment va Shalna ? Je n'ai pas eu la force... De la consoler.
Mademoiselle, vous pleurez ? J'ai mal. Console-moi.
Réunion. Il y a danger. On déménage ? Ils ont besoin d'aide...

Je dois... finir ma ...mission.
Je dois finir ma ...mission.
Je dois finir ma mission.

Je déplie un bras, une jambe. Je tends la main. Je glisse, me fracasse sur le sol.Tu te souviens ? Tu m'avais dit que je n'avais jamais été aussi belle que résigner. Je suis dévouée à la cause. A Eorzéa. A elle. Je me résigne à finir la mission.
Me trouve-tu belle maintenant ? Me trouve-tu désirable ? Dis, Tu as envie de moi ?

- C'est ça, Aranael. Lève-toi ! Debout !
Je rampe, je sens des mains qui me soulèvent, me remettent sur pieds. Mes jambes ont du mal à me porter. Je me sens faible, j'ai envie de vomir. D'autres mains, plus douces, me coiffe et m'habille. Je cherche distraitement mon arme contre le mur, serre la poignée rassurante. J'émerge, un peu. Sur mon front, maman remet une nouvelle gemme. Noire. Maman, j'ai mal.
Je tente de me remettre sur mes jambes. Ca tourne. Ca tangue. Je vacille, tombe, réessaye, encore.

- ... Debout ! DEBOUT !!!
Je flanche, m'agrippe au mur, avise le plateau-repas. J'enfourne le pain, ça coince. Ca n'a pas de goût. je m'étrangle, je déglutis. C'est si fade. Mes yeux piquent. Je me force à finir.
Je ne peux pas les laisser. Malgré tout ce qu'on m'a dit, malgré le nombre de fois où on a voulu m'écarter, malgré mon instabilité, malgré la mort, malgré ce que tu pense de moi, Shalna. Un tournesol a besoin d'eau. Je suis une goutte. Espérance c'est nous. C'est moi.
La Gardienne. La protectrice... Les protectrices. J'ai été choisie. Je me lève. J'arrive.

Papa, regarde. Je suis debout.

Je suis Aranael Emerald, je suis cassée. Je vais mourir. Mais avant, je finirai ce que j'ai commencé.
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Message par Aranael Ven 27 Nov - 19:39

[hrp] Attention. Le texte que vous allez lire n'est pas la réalité. Ca ne s'est pas produit. Il s'agit d'un texte sur une situation imaginaire, une fin "possible". Ceci est une sorte de fanfiction.
S'il vous plait, ne faites pas ça chez vous. [/hrp]


"Toute seule.
Je suis... Toute seule."


Ils sont partis, les uns après les autres. Ganzorig, mon guerrier, fut le premier... Et ensuite...Ensuite...

A ceux qui ont quitté Espérance. Ceux qui ont disparu dans la nature, ceux qui n'ont plus de traces... Ne vous retournez pas. L'espoir est mort. Ne revenez pas. Ne me regardez pas.
Surtout... Ne me regardez pas.

Le portail s'est refermé derrière elle, sans laisser aucune trace, sans le moindre bruit, comme s'il n'avait jamais existé. Un mage aurait pu déceler une présence ténue, un mince filet d'éther qui flotte, de minuscules particules en suspension, prêtes à s'envoler aux moindres vents. Mais il n'y a pas de mage. Il n'y a personne.

Juste elle.

Elle est à terre, elle souffle fort, hagarde. Sa vision est trouble et elle titube, se rattrape d'une main, tente d'avancer à genoux. Elle a laché son arme, sa hache, sa fidèle hache, qui gît un peu plus loin abandonnée sans un regard dans la poussière. Son armure est fracassée, en lambeaux. Elle ne sent plus son bras. Sa tête bourdonne, l'assome, résonne. De toute façon, elle n'entend plus rien. A chaque mouvement, elle laisse une trainée de sang sur son passage. Ca part de rien, ça continue sur le chemin. Il faut avancer. Non. Il ne faut pas avancer. Elle s'arrête, chancelle puis s'éffondre sur le côté. Et reste là.

Il est parti le premier. Elle ne l'a pas vu, elle était au prise avec l'ennemi. L'elezen, le chevalier blanc. L'innébranlable s'est fait fauché par un monstre. Son armure a été percée comme si c'était du papier. Elle a crié après lui, aveugle, lui a marché dessus sans s'en rendre compte. Elle battait en retraite. La petite aora avait tenté de le sauver, mais on l'avait arraché au corps sans ménagement. Emportée. Elle avait disparu dans le flot d'ennemi, son regard bleu fixé désespérément sur elle, bras tendus. Le chevalier noir avait essayé d'aller la chercher. C'était sa protégée, son amie. Il avait tout donné. Il était devenu fou. Il frappait sourdement sur ce qui se présentait, riait à gorge déployé quand 20 combattants lui tombaient dessus. Jusqu'à ce que les tenèbres le consumment, le brûlent, l'embrasent. Jusqu'à ce que les 20 combattants suivant le submergent. Jusqu'à ce qu'il ne réaparaisse plus. A ce moment-là...
A ce moment-là, elle avait oublié pourquoi elle se battait. Elle avait peur. Elle voulait fuir. Courir le plus loin possible, le plus vite sans se retourner. L'emporter.
Le tireur faisait face, il couvrait les arrière de la Protectrice au loin.Ils ont disparu de sa vision dans un tourbillon de poussière.Il fallait la sauver. Il fallait en finir. La Gardienne, où était-elle ? La Gardienne. La Gardienne. La Gardienne.

Est morte.

Son petit corps n'est plus. Transpercé. Foudroyé. Disloqué. Il ne reste qu'une présence. Elle a peur. Elle étouffe. Tu es morte. Une vision dorée qui s'évanouit petit à petit, alors qu'avec des gestes désordonnés, elle essaye de les rassembler. Le monde s'ouvre en deux, la terre tremble, s'ébranle. Le ciel se déchire. L'air est irrespirable, vicié. Une fente s'ouvre devant elle, s'élargit, offre une image furtive d'un coin paisible. Où sont les autres ? Elle ne sait pas, elle ne sait plus très bien. Elle ne les voit pas. Ils ont disparu. Elle ne réfléchit pas, soulève la petite femme dans ses bras, force le passage. Il faut fuir. Il faut partir. L'emmener loin, là où elle sera protégée.
Elle passe et tout s'efface.

Le corps ne l'a pas suivi. Devant elle, un chemin de pierre qui mène à la cité se dressant en contrejour, la narguant de son immortalité. Mais personne. Elle est seule. Elle est partie.
On l'a retrouvée après deux jours, étendue sur le sol, à fixer le vide. Les plaies se sont infectés, les charognes guettaient déjà le repas. Elle n'a pas parlé. Elle n'a rien dit, pas réagi. On l'a emportée comme on emporterait du bois mort. On l'a soignée, rendue à sa famille. Mais elle n'est plus là.
Elle a hurlé un soir, s'est arrachée les cheveux par poignée entière. Elle s'est fracassée contre les murs, s'est jetée au sol, démente. Elle a pleuré jusqu'à ce que son corps ne puisse plus tenir. Elle s'est éffondrée à nouveau et ...
On a pas pu la nourrir. On a pas pu la sortir de sa torpeur. Elle a répété des noms, en boucle, durant des heures, des jours, des semaines.
Shalna. Shalna. Shalna. Ganzorig. Ishmael. Sakopi. Gaedon.Mika. Iranh. Promyse. Ji. Calypse.

Espérance. ESPERANCE. ESPERANCE.

Son corps a blanchi, s'est affaibli progressivement. Ses muscles dont elle était si fière ont disparu, jusqu'à ne laisser qu'une peau tendue et sèche sur ses os. Ses parents la lavaient tous les jours, la changeaient sans rien obtenir que ce regard qui fixe un autre monde. Bientôt, elle ne pouvait plus marcher. Bientôt, elle ne bougeait plus. Sa respiration est devenu un souffle lent. un râle. Ca a duré des mois, jusqu'à ce qu'elle ferme les yeux. Son univers entier a disparu. Elle disparaitrait aussi. Il est trop tard, tout est fini. Le corps est mort, l'esprit aussi. Elle a été brisée. Elle a été détruite, morceaux par morceaux, arrachés à chaque disparition, à chaque abandon. Je vous ai aimé. Je vous ai chéri. Vous étiez mon univers, ma vie, ma mission. Tu étais ma lumière. J'ai échoué, mon amour. J'ai échoué, Shalna. Je n'ai pas pu te donner la vie et monde qui nous voulions. Je n'ai pas pu vous serrer dans mes bras, et vous sauver. J'aurais aimé vous dire "regarde tout est fini, rentrons." j'aurais aimé vous voir heureux. Ton sourire... Une dernière fois. J'ai survécu, et c'est un gâchis. Je ne veux pas continuer sans vous... Je ne veux pas de cette vie. Me pardonne-tu, Shalna ? M'en veux-tu ? Non... Tu n'as jamais réussi à m'en vouloir longtemps. Je ne me pardonne pas. Je n'ai pas été assez forte. Tu sais Shalna, je pensais qu'elle sortirait, cette bête en moi. Et puis je t'ai vu. Et le monde est devenu tout noir, comme la nuit. J'ai peur Shalna. Est-ce qu'il est là-haut avec toi ? Est-ce que tu m'accueilleras à bras ouverts ? J'ai peur. J'ai tellement peur. Shalna, s'il te plait. Brille pour moi.

Je suis toute seule.

Elle n'est plus rien, juste une coquille qui attend. Elle attend de devenir une étoile. Elle rejoindra son soleil. Elle aimera à nouveau. Elle les retrouvera... enfin.

Ainsi disparait Espérance. Ainsi disparait l'espoir. Dans le dernier battement de coeur d'une femme qui a trop aimé. Qui a tout perdu.

A ceux qui ont quitté Espérance. Ceux qui ont disparu dans la nature, ceux qui n'ont plus de traces... Ne vous retournez pas. L'histoire est terminée.
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Message par Aranael Jeu 4 Fév - 22:07

A ceux qui ont quitté Espérance. Ceux qui ont disparu dans la nature, ceux qui n'ont plus de traces...
Ne vous retournez pas. L'histoire est terminée.

J'aurais aimé vous raconter une belle histoire. Une histoire d'espoir.

J'avais déjà pensé à une conclusion. Toute conclusion de vie, c'est la mort. J'avais déjà pensé à une mort. Anonyme vous voyez, sur un champ de bataille quelconque. "Banale" en quelque sorte. Une mêlée qui tourne mal, un coup qui transperce armure et chair, déchiquète et broie son corps. Elle s'effrondrerait au sol avec un râle d'agonie dans l'indifférence générale. Le sang et la boue recouvreraient petit à petit son corps et on la retrouverait des heures plus tard, piétinée au milieu des autres cadavres. C'est la guerre, non ? Mourir pour un idéal.
C'était ma première idée. Et puis avec le temps et le scénario, la survivante. Celle qui reste, celle qui voit les autres partir. Qui lache prise, désespérée. Elle l'aurait perdue, ELLE, eux. Chaque fibre de son être aurait été brisée. Elle serait partie en haut de sa tour et elle serait morte.
Vous savez, j'ai fini par y prendre plaisir à la voir se détruire comme ça. La chute. Une déchéance lente, insidieuse, perfide. J'ai hésité, jusqu'au bout à la sauver, à la faire grandir. Et puis non. Je ne veux pas oublier, je ne veux pas forcer un changement. J'aime ce à quoi elle est liée. J'aime ce scénario, cette histoire.

S'il vous plait ne me blâmez pas, ne l'oubliez pas. Elle est Aranael. Et c'est une héroïne.

Rumeurs du Nord, Espérance. Adieu13

Il y a eu de la tendresse, maladroite. Des gestes, des murmures, des actes. Et pendant un temps, pendant un instant, tout était magnifique. L'étincelle était si brillante qu'on devait clore les yeux pour ne pas être aveuglé.
A ce moment, j'étais heureuse.
Elle était tout. Inspiration, émotion, chaleur. Ses mots guidaient mes pas dans les ténèbres, sa voix me tenait debout, mes bras bougeaient à ses ordres. J'ai découvert un monde que je ne soupçonnais pas, magnifique, gigantesque. Tout ce que je savais, tout ce en quoi  je croyais, mes ambitions, mes convictions, ce n'était rien . RIEN ! Comment ai-je pu passer à côté tout ce temps ? Un dieu. C'est un dieu. Le dieu veille sur moi et moi je veille sur le dieu. Nous sommes en communion et rien ne me détournera. D'ailleurs, nous n'avions plus besoin de parler n'est-ce pas ? Tu me manquais tant. Je ne sais plus très bien si tu es... humaine... Ou...
Qu'est-ce que tu es exactement ? Qui es-tu ?
Tu es...
Tu es ma mission.
La sauver ou disparaitre.

Quand tu m'as nommée protectrice, je savais que ça ne voulait rien dire. Mais moi j'y ai cru. J'y ai réellement cru.
Ma mission. Ma mission. Ma mission.
En vrai... Je savais qu'elle allait mourir. Non, pas mourir, c'est au-delà de ça. Transcender ce qu'elle est. Retourner. Elle avait pris sa décision depuis longtemps, qu'elle cachait, qu'elle taisait. Je savais qu'elle restait pour moi, pour nous. Parce que nous... je n'étais pas prête à l'accepter.
Je ne le suis toujours pas. Je ne le serai jamais.
Je t'aime tu sais. Je te déteste tellement.
Comment peux-tu me faire ça ? Tu ne m'as pas préparée. Je suis si faible. Je me dégoûte.
Papa, Ganzorig. J'ai peur. Je n'y arrive pas.

" Je ne peux rien faire."

Quelle genre de sensations on éprouve dans un moment pareil ?
J'ai hésité. Est-ce que tout allait partir d'un cri, comme un éternel recommencement ? Parce qu'au final, pour elle, c'est juste une répétition d'évènements effrayants qui la tuent à petit feu. Alors oui ça aurait pu être un cri. Une longue description de sa souffrance, de ses larmes et de ses suffocations.
Mais non. Parce qu'elle ne peut rien faire. Et au moment précis où elle a compris ça, il n'y a plus rien eu.
Hurler, pleurer, détruire, c'est exprimer quelque chose. C'est faire passer un sentiment, un appel à l'aide. C'est montrer sa douleur, sa souffrance au monde et à tous ceux qui sont présents.
C'est vivre. Et quand on vit, on finit par avancer, par s'en remettre avec le temps. On oublie.
Mais y'a plus de temps. Y'a plus de vie là-dedans putain. Plus d'avancement. Dans sa tête, c'est un putain de légume. Les chaines, les câbles, appelez ça comme vous voulez, ils ont tous sauté d'un coup d'un seul. Je crois que personne n'a jamais compris l'attachement malsain qu'elle avait avec ceux qu'elle aimait. Tout était trop gros pour cette enfant qui sortait de chez elle après 26 ans. Vous l'avez cassée.

Rumeurs du Nord, Espérance. Aralyg11

A partir de maintenant, c'est tout noir. Tout vide.
Y'a plus de paillettes, plus de battements de cils, plus de rougissements incontrôlés. Plus de "ho", plus d'excuses. Plus d'ours, plus de bleus. Plus de muscles. Plus de raisons.
Rien.
Elle est là à fixer le mur. Elle attend.
Aujourd'hui, elle ne s'est pas levée. Les mains jointes sous sa tête, serrant fort entre ses doigts son collier, elle est restée allongée dans son petit lit. Son regard s'est éteint. Papa est passé une fois, deux fois, trois fois avant de finalement abandonner.
Ca y est ma fille, tu es partie avec les tournesols.
Elle les perçoit enfin clairement. Elle. Lui. Elle sent à nouveau sa main glissant dans sa nuque, son dos et ses lèvres qui se posent dans son cou. Je sens ton odeur, chasseur.
Elle voit à nouveau ses grands yeux verts, sa maladresse, sa douceur. Elle danse pour elle toute la journée et quand elle se fatigue elle s'assied à côté d'elle, coupe une pomme, lui tapotant affectueusement la cuisse comme une vieille amie, la rassurant d'un sourire.
"Tu es à la maison Aranael, nous sommes en sécurité. Tu nous as sauvés. Merci, protectrice."

Parfois, dans un élan incompréhensible, elle se lève. Sur les murs de sa chambre elle dessine des soleils d'or.

Et elle sourit.
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Message par Gaedon Sorel Dim 7 Fév - 20:29

Le dernier des Officiers

Elle quitta la pièce, après avoir signé le registre de l'escouade marquant son intégration. Mais cette jeune recrue n'était pas venue au quartier d'Espérance uniquement pour en rejoindre les rangs. Elle avait un important message à délivrer pour l'Escouade.

Gaedon s'enfonça dans son fauteuil et pris le temps d'analyser la situation. Certes l'escouade avait gagné une nouvelle recrue. Mais Rose Kaerell était à la base aussi venu pour annoncer la démission, le retrait ... d'Aranael Emerald. Elle n'était plus en état de poursuivre le combat. Déjà depuis la mort de Ganzorig, elle n'était plus la même. Cette perte l'avait touchée, elle, plus que les autres. Couplée à la récente maladie qui semble emporter le capitaine doucement, cela a finit de brisée Aranael en petits morceaux. Brisée, c'est le terme que Rose avait employé. Aranael était complètement brisée et son père avait interdit à quiconque de l'escouade de l'approcher. Aranael ne devait plus rien avoir avec l'Escouade pour se reconstruire, et l'escouade ne devait pas aller la voir pour qu'elle se reconstruise.

Rumeurs du Nord, Espérance. 588787Gaedon1

Gaedon se releva et pris la direction des quais pour réfléchir au clair de lune. Il resta longtemps au bout de la jetée à regarder l'eau. L'heure était au bilan. Cela faisait presqu'un an qu'il avait rejoint l'escouade. Espérance avait prospérée sous la férule des Fortemps et s'était fané aussi vite qu'une rose que l'on cueille lorsqu'elle a pris son indépendance.

Rumeurs du Nord, Espérance. 883048Gaedon2

Le premier des officiers qu'Espérance avait perdu était son argentier et son diplomate. Ji Liuh était parti sans expliquer son geste, après que son père fut arrêté et mis en prison. Puis le Capitaine tomba malade et son état empira avec le temps. Elle finit par sombrer dans un état de coma. Après un bref retour, Ishmael ne donne de nouveau plus aucun signe. Halone, seule, sait où il est allé et dans quelle mission il s'est engagé. Et là, ce soir, c'est Aranael, par Rose Kaerell, qui quittait l'escouade. Des cinq personnes qui avaient des responsabilités importantes dans l'escouade, Gaedon était présent. Il allait devoir trouver un chemin pour que l'escouade puisse se reconstruire.

Mais la situation n'était pas complètement désespéré. Bien sur des membres importants de l'escouade n'était plus là aujourd'hui. Mais des nouvelles recrues venaient de s'engager. Gaedon se devait d’être là pour ces nouvelles personnes.

Il était le dernier des officiers.
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Message par Aranael Dim 21 Fév - 16:11

"Il était le dernier des officiers."

Cette fois-ci, je ne vous raconterai pas ce qu'elle a vu, ce qu'elle a ressenti.
On est venu la chercher. Il semblerait qu'on ne veuille pas la laisser être heureuse dans ses illusions. Il semblerait qu'elle ait encore un rôle décisif à jouer.
C'est mon dernier retour. Mon dernier acte. Cette fois, il n'y aura pas de tour de passe-passe, pas de solution alternative.
La victoire ou la mort.

Ave Espoir, celle qui va mourir pour toi te salue.
.
.
.

"J'ai plus de porte."
C'est le triste constat en fixant l'entrée. J'ai plus de porte. La jeune fille me l'a pétée. J'sais plus son nom, c'était un sbire à l'autre poison. J'ai mal au bras. Je crois que c'est cassé... Parbleu, c'est cassé ? Monstre. T'es venue la chercher. Je te tuerai pour ça.

Et en prime j'ai plus de porte. Ca fait  3 jours que j'ai pas de portes. Je me suis vaguement inquiété des voleurs, mais enfin, y'a personne qui passe par ici. Ca laisse une jolie vue sur le jardin, note. On devrait inventer, ça. Des grands murs en vitres. Pour mieux voir le dehors.

Les marches craquent quand elle descend, je peux entendre le bois protester d'ici. C'te bicoque tiendra jamais le coup. Trop lourde avec son armure. Pourtant elle avait minci ces derniers temps. Ses muscles se dégonflaient ! Pfiout ! Comme un ballon.
Ca brille, ça étincelle, au point de détourner les yeux. Ca fait combien de temps qu'elle la prépare c't'armure ? La complète, on voit pratiquement pas sa peau. Je crois même qu'y'a un casque sous son bras. J'ai pas envie de voir ça.

M'affaler dans le fauteuil, passer une main sur mon visage fatigué. Pas un mot, elle ne dit rien. Hey, j'suis là ! Ne m'ignore pas, gamine. Je la vois qui décroche sa hache du mur, la soupèse, la place soigneusement dans son dos, disparait au détour d'une colonne, réapparait furtivement. J'entraperçois ses mouvements, elle décroche une perle de son porte-clés. La verte. Je vois bien ce que tu veux faire. Tu l'as reposée sur la commode avec une infinie douceur. T'as pensé à ta mère ? T'as pensé à maman ? La perle verte. C'est la perle verte.

Et là je comprends.

Pas un regard, elle ne voit rien. Elle n'ose même plus me regarder en face. Elle attend dans l'entrée, semble hésitante. Hésitante à quoi ? Tu as fait ton choix ma fille.

J'aurais pu te protéger. Je me serais occupé de toi, comme je l'ai toujours fait. Tu penses pas que t'as assez donné ? Que t'as assez fait ? T'étais pas bien là-haut ? Moi je te le dis.
Tu vas mourir, ma fille. Tu as choisi de mourir. Entre ta famille, ton foyer, et cette guerre tu as choisi. Je ne suis pas fier de toi. Je ne le serai jamais. Et jusqu'au bout, jusqu'au moment où je tiendrai ton cadavre dans mes bras, je te détesterai pour ce choix. Je ferai comme si tu n'avais jamais existé, je tairai ton nom, je ne consolerai personne car personne ne sera plus inconsolable que moi. Tu me déçois, ma fille.

Depuis quand est-ce que tu es aussi grande ? Je vois ton dos, bien droit. Ta nuque, tes cheveux ébourrifés. Ton arme. Je ne me souvenais pas que tu étais aussi grande. T'as poussé cette nuit ? Maman t'a donné trop de soupe.
J'ai mal putain. Y'a de l'eau qui coule de mes yeux, j'ai le nez qui m'irrite, la gorge qui gratte. J'ai mal aux bras et j'ai trop chaud. Me regarde pas, reste tournée.

Je crois que t'as murmuré un truc.

Quand j'ai retiré ma main de mon visage, il n'y avait plus personne dans l'entrée.
Je n'ai plus de porte. Et maintenant, je n'ai plus de fille.
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Message par Aranael Sam 7 Mai - 18:06

J'ai froid.

Mon manteau ne me protège pas suffisement du vent, je suis trop lourde. Je m'enfonce dans la neige, laissant un sillon plus que des traces sur mon passage. Mon souffle trace des volutes de fumée qui m'hypnotisent un instant, avant que le poids de la pelle  sur mon épaule ne se rappelle à moi. Avancer. Je ne suis jamais revenue ici et pourtant, malgré la neige  et  les mois, je me souviens clairement du chemin à emprunter. Tourner à gauche et continuer, continuer jusqu'à l'épuisement. Une fois que je n'en pourrais plus... Ce sera un peu plus loin.

Au milieu de nul part.

J'aperçois les quelques pierres. Sobre... invisible. Là. C'est là. Juste là.
Je lache mon outil qui s'enfonce dans l'épaisse couche de neige, éponge mon front, me laisse tomber au sol. Humide, glacial, je sens le lieu et son hostilité me pénétrer jusqu'aux os, jusqu'au plus profond de mon être. A perte de vue, la blancheur. Est-ce vraiment dans cet endroit que je t'ai laissé ? Pourquoi déjà ? Je ne me souviens pas. Je ne me souviens plus. Je n'ai pas pu me résoudre à suivre tes coutumes.
Je me déteste pour beaucoup de choses. Et il y a encore plus encore que je ne me pardonne. Ta mort en fait parti. Mon comportement et mes mensonges. Ce que je m'apprête à faire fera probablement parti des pires. J'espère que personne ne saura jamais. Que personne ne comprendra. Que personne ne verra jamais mon visage en cet instant. Tu m'en veux ? Je suis désolée... Tellement désolée.
Mais je ne peux pas le laisser ? Tu comprends ?

Ce collier, c'est mon trésor, ma relique, mon symbole. Tout comme la gemme sur mon front, c'est pour me protéger. Je peux tout donner, tout faire mais... Mais ça... ? Je ne peux pas le perdre. Je ne peux pas le transformer, même si il est utile, même si il doit servir, même si il est probablement le plus à même de réaliser notre projet... Je ne peux pas. Je préfère encore leur offrir tout le reste.
Prenez ! Prenez tout ! Je vous le donne, je vous donne tout ! Pour ma mission !
Je sais que pour le bien de... Non...
... Je...
Ne sais pas. Tu m'en veux ? Pourquoi tu ne me réponds plus ? C'est ça ta réponse ?

Je prends ma pelle, inspire,  creuse. Encore, encore, je creuse, déblaie la neige jusqu'à atteindre la terre gelée. Et je répète l'opération, j'enfonce, jusqu'à avoir un trou qui s'élargit, grossit, enfle, prêt à m'absorber comme une bouche béante, brunâtre, sale.

J'ai froid. J'ai faim. Mon ventre grogne et je me sens bête.

Bientôt, elle atteindra ton corps. Un petit coup de plus, un bout d'épaule cadavérique qui apparait. Je la lache, l'envoie plus loin, continue à mains nues.

Je ne peux pas leur laisser, tu comprends ? Si je perds ce talisman, tu disparaitras. Et je ne suis pas prête pour ça, tu comprends ? Dis, hein ? Tu le sais n'est-ce pas ? Je dois essayer. Trouver autre chose. On ne me blâmera pas pour ça, si ?
Je gratte la terre jusqu'à perdre mes ongles. Mes doigts sont bleus, je ne sens plus grand chose. J'ai peur. J'ai horriblement peur. L'effroi, une masse grouillante, qui prend aux tripes. Malsain. J'ai envie de te voir. Je ne veux pas te regarder.
Alors lentement, les vêtements apparaissent... je vois tes veines, si bleues... Ta peau est dure... Tes mains, l'objet de ma convoitise. Pas tout de suite... Encore un peu, j'y suis... presque... Presque j'y suis... presque...
Dans un hoquet d'horreur, j'aperçois ton visage. La mort te rend beau, mon amour, mon guerrier. Tes traits tirés... opalescent... Tes cheveux n'ont jamais été aussi noirs...
J'étouffe en te voyant comme ça. Assise au dessus de ton corps, dans ce cocon blanc gelé... Je me souviens pourquoi ici. L'idée absurde que tu t'animes, que tu me tires avec toi dans cette dernière demeure. J'ai peur. Qu'est-ce que je suis en train de faire ? Je ne sens plus rien. Par les douze, qu'est-ce que je fais ici ? Qu'est-ce que je fais là ?
Je m'empare des dagues, ce que j'étais venue chercher,  à une vitesse effarante, les dissimulants dans un replis du manteau.

Fuir. Je dois partir d'ici. Je n'aurais pas dû faire ça. Rendors-toi. Rendors-toi.
Refermer ce trou, faire disparaitre ce corps à nouveau, l'enfouir sous la terre, sous la neige, dans le temps. Pour toujours.

Rendors-toi, mon chasseur. Jusqu'à notre prochaine rencontre.

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